Je dispose de moi comme d’une arbalète
Je suis une arme aux mains d’un peintre maladroit
Qui mêle à des couleurs le sang de sa palette
Quand son cœur comprimé se plaint d’être à l’étroit
Et si j’étends les bras vers toi c’est comme un chêne
Sa force ne rompt pas son immobilité
Il reste prisonnier du poulpe qui l’enchaîne
Puis la terre entre en lui contre sa volonté
Dans les rues éclatées transformées en rivière
Je reconnais de loin ma fille à son panache
Une flamme est sortie de sa bouche de verre
Comme d’un appareil photographique un flash
.
Où est-il ?
Il dort, il joue au loin
me laissant seule
avec mes cadenettes et mes balles
jongler avec la lune bonne nature
qui se laisse saisir par ma main avide
la Lune est décroissante
et montante
elle vient à peine de passer le coin de la maison
nous avons été aussi surprises elle que moi
de nous croiser là
sûres que rien ni personne à cette heure
ne nous détournerait de notre chemin
Le mois de juin est-il le mois de la Lune
tous les autres étant ceux de l’océan
La lune est une tache d’eau
singulière et unique
plurielle des gouttes qui la désaltèrent
et je la bois des yeux
même si je les tiens fermés
.
C’est alors que les arbres se mettent à bouger
Je les vois encore comme si cela se déroulait devant moi
Ils se déplacent lentement par deux ou trois
Certains font des bonds et le sol tremble sous leur poids
Deux chouettes blanches passent au-dessus de la route
Volent de gauche à droite
Une fumée grise s’échappe par la cheminée d’une maison
Les croise et rampe vers un abri dissimulé au sein de la nuit
La terre renvoie la lumière de mes phares vers le ciel
Je comprends la démarche des arbres
Ils fuient loin de l’eau
.
Nonchalant, le mât d’artimon pointe et descend
Mettant en danger un nuage incandescent
Mais il est bien trop tard pour que tombe la pluie
Sur l’horizon rougi, la brise s’est alanguie
.
On pose des amarres au hasard des courants
C’est l’ancre qui s’accroche, tapages conquérants
À l’envers du soleil, sur la dune bleuie
Une écharpe s’envole et la nuit s’est enfuie
.
Sous l’éclairage bienveillant de la lune, dans le désordre et à l’abri d’un parapluie végétal, vous reconnaîtrez Eclaircie, 4Z, Héliomel et moi-même.