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« On ne peut plus dormir
tranquille quand on a
une fois ouvert les yeux . »
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Pierre Reverdy – » Le Gant de Crin ».
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« On ne peut plus dormir
tranquille quand on a
une fois ouvert les yeux . »
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Pierre Reverdy – » Le Gant de Crin ».
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Monter dans un grenier, c’est comme monter dans un avion
Au lieu des rires des passagers, de l’air pressurisé
On entend les rires des poutres et le bruit de soie du vent
Le voyage est plus court que les souvenirs anciens
Tiens, je croyais pourtant avoir remplacé la vitre du vasistas
Le bol bleu à l’anse brisée, une publicité bébé Cadum
Des liasses de feuilles d’impôts sur un pot de chambre
Tout est à sa place, les lettres de ma grand’mère
L’encre oscille entre le mauve et le sépia
Elle avait une belle écriture, appliquée, penchée,
Comme elle l’était sur moi quand elle me prenait sur ses genoux
Pour me faire oublier que les tombes bombaient au hasard
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Il faudrait quelquefois dormir sous une pierre
Sa chaleur nourrirait les petites graines
Que certains nomment les rêves
Une montagne surgirait alors de l’ ombre
Le soleil serait une fleur à larges pétales orange
En contrebas courraient quelques oiseaux
Bien sûr dépourvus d’ ailes le temps que volent un peu les zèbres
Des éléphants d’ hiver nageraient la brasse
Avec l’ élégance de ces petites danseuses aux bras levés
Qui ornent le couvercle des boîtes musicales
Sur le sommet bleu du sommeil
Un hérisson dormirait en tenant contre lui un réveil
Et quand viendrait le moment d’ ouvrir les paupières
Les éléphants dociles sortiraient de l’ eau
Pour retourner sagement au fond de notre cerveau
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La route cherche à fuir or l’auto la rattrape
On appuie fermement sur l’accélérateur
Et les chevaux sortent furieux de l’écurie
Beaucoup comme Pégase ont des ailes mais l’amble
Suffit pour voyager sans heurt, destination :
L’horizon. L’horizon ce mythe insaisissable
Une barque à moteur l’atteint et le retient
Dans une nasse où fut capturé le soleil
Mais on l’a relâché sans attendre les plaintes
De la terre privée de ce grand fleuve d’or.
On marche sur un fil entre des continents
Cajolés par la mer. Un avion les survole
Une flèche privée de cible un cri pour rien
Dans l’espace. Artémis y fait la sourde oreille.
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Qu’importe les couleurs que l’on ne sait décrire
L’eau sur la tempe blanchit nos petits jours
Trois carreaux sont cassés mais l’on veille à marcher
Dans la rue dessinée en dehors de toute ombre
Le puits comblé retient la source
Pourtant la mousse entend sa force frapper la pierre
Les empreintes de la main se fondent aux draps
Tendus pour recueillir ce qu’il reste de sommeil
À cet hiver immobile
Peut-être un pas nouveau marquera-t-il de rouge
Le sillon de cendre creusé jusqu’à la route
Que la toile renaisse et l’œil s’entrouvre
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Eclaircie
Elisa
Héliomel
4Z2A84.
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Une vidéo intéressante :
via Google :
Guy Goffette – Babelio com – Par Alice 5 le 12.02.2012 Librairie des Gatines Paris 20.
Goffette y parle de sa conception de la poésie, etc.
On se trouve souvent où l’on ne s’attend pas
Dans le buffet dont la porte grince
Quand on l’allège de ses confitures
Quelqu’un nous voit quelqu’un crie au voleur
Avec notre voix
Cette main qui nous gifle c’est la nôtre
Cet adulte qui nous tance nous ressemble
Pour nous punir on nous met en pot
Et parmi les conserves nous attendons
Qu’un autre chenapan ouvre la porte
La porte au si gracieux grincement
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Le hasard déambule dans les cours désertées
Où le bruit de ses pas résonne et s’amplifie
Un oiseau sur l’épaule il s’enracinerait
Si le vent ne l’avait contraint d’errer encore
À chercher quelque toile aux reflets d’un étang
Quand un galet ricoche et finit par sombrer
Nul ne connait d’avance le chant de son sursaut
On déchire le voile façonné par le gel
Ses lambeaux porteront au seuil de la mémoire
Des signes incertains comme fruits du hasard
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Au revers de chaque regard un rêve attend
Quand les yeux se ferment, il nous aborde
Impression de déjà vu
Et si c’était le contraire ?
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Il y a bal sans parquet
Les éventails brassent du vide
Ou alors un peu de neige
Qui tombe des cristaux éteints
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Dans le jardin d’hiver
Un lion grelotte
Je ne peux plus parler
Lui ne peut plus griffer
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Terrasses, margelles, gloriettes
Sont éclairées par un singe
Qui tient des flambeaux à l’envers
J’aimerais graver ton nom sur les vitres de l’orangerie
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La traversée semble soudain prendre fin
Les côtes, les lumières, le bruit des foules
Chacun soupire se disant que finalement
Ce voyage fut plus facile que prévu
C’est le petit mousse qui remarque le sifflement
Les visages graves semblent taillés dans la cire
Tant les couleurs en sont absentes
Le roulis tendre des vagues s’accentue sensiblement
Tandis que la nuit déplie sa couverture de nuages
L’enfant appuie sur l’interrupteur en baîllant
Cette vieille télévision de plein air a fait son temps
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Les plans de l’armoire ont été dessinés par Eclaircie, Héliomel, 4Z et moi-même.
De QUI est ce poème ?
Il s’agit d’un auteur célèbre.
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« que ferais-je sans ce monde sans visage sans questions
où être ne dure qu’un instant où chaque instant verse dans le vide dans l’oubli d’avoir été
sans cette onde où à la fin
corps et ombre ensemble s’engloutissent
que ferais-je sans ce silence gouffre des murmures
haletant furieux vers le secours vers l’amour
sans ce ciel qui s’élève
sur la poussière de ses lests
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que ferais-je je ferais comme hier comme aujourd’hui
regardant par mon hublot si je ne suis pas seul
à errer et à virer loin de toute vie
dans un espace pantin
sans voix parmi les voix
enfermées avec moi »
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Trois Poèmes de Marc Alyn
Marc ALYN
Marc Alyn (né en 1937, à Reims) reçoit à vingt ans le Prix Max Jacob.
Depuis, à côté de nombreux ouvrages en prose (critique, roman, théâtre) il a fait paraître plus d’une quinzaine de recueils de poèmes.
En 1973, il a reçu le Prix Apollinaire pour « Infini au-delà » et en 1994, le Grand Prix de Poésie de l’Académie française et le Grand Prix de Poésie de la Société des Gens de Lettres pour l’ensemble de son oeuvre.
Poésie(s) de Marc ALYN :
« L’enfant de lune.
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La lune en maraude au coeur des vergers
Grimpait aux pommiers en jupon d’argent ;
Surgirent des chiens rauques, déchaînés :
La lune s’enfuit, laissant un enfant.
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Il vint avec nous en classe au village,
Tout à fait semblable aux autres garçons
Sauf cette clarté nimbant son visage
Sous le feu de joie de ses cheveux blonds.
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Il aimait la pluie, les sources, les marbres,
Tout ce qui ruisselle et ce qui reluit ;
Le soir il veillait très tard sous les arbres
Regardant tomber lentement la nuit.
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La lune en maraude au coeur des vergers
Vint chercher l’enfant un soir gris d’automne :
Vite, il s’envola. J’entends à jamais
Le bruit de son aile amie qui frissonne. »
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Marc ALYN
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« Nuit dansante
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Quand le hibou joue de la flûte,
Le grillon sort son violon,
La hulotte prend son luth
Et le crapaud son basson.
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Cela se passe dans le Sud,
Non loin du vieux pont d’Avignon,
Sur le Rhône, c’est l’habitude
De danser ainsi tous en rond.
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Chats-huants, quels entrechats
Grand-duc, aimez-vous le rock ?
Mais qui sont donc ces petits rats ?
Des surmulots. Ah! quelle époque!
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Ainsi danse-t-on dans les bois
Chaque nuit jusqu’au chant du coq,
C’est du moins ce que dit mon chat
Natif d’Uzès, en Languedoc. »
Marc ALYN
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« Le papillon
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Né au pays de la soie fine
Dans un cocon venu de Chine,
L’Orient est peint sur ses ailes.
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Jaune ou bleu, vert ou vermeil,
Il vole, il va, il vit sa vie
A petits battements ravis.
Dans l’air doux, comme un éventail.
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On le voit, on ne le voit plus,
Il est ici, il est là,
Ou bien c’est un nouveau venu
Son jumeau qui passe là-bas.
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Ah ! Mettez au clou vos filets,
Jetez épingles et bouchons,
Laissez-le libre car il est
La poésie, le papillon ! »
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Marc ALYN
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La forêt est entrée dans mon cœur et j’ai cru
Voir les arbres donner moins d’ombre et plus d’étoiles
On entendait la voix des sources s’éclaircir
Le vent rafraîchissait les feuilles au tapis
Peut-être en avançant de quelques pas l’épée
De la lune ferait un trou dans les taillis
Alors des animaux furtifs se glisseraient
Hors de chez eux pour boire un lait tombé du ciel
Là-haut quelqu’un chantait mais nous n’avions d’oreille
Que pour l’eau dont l’interminable mélodie
Endormait doucement nos têtes douloureuses
Nos têtes qui roulaient sans décider sur quelle
Epaule s’appuyer pour seller des licornes
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L’homme en bois dodeline
Et sa démarche étrange étourdit le monde
Il croit aux étoiles comme on berce l’espoir
Un matin il rêve que la nuit prend fin
Qu’elle se meurt d’un amour impossible
C’est alors qu’il entrevoit une brève lueur
A l’instant où la vie réchauffe ses cercles vides
L’homme en bois prend chair
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La fièvre dans le chaudron
Dissout les grêlons rouges
Que la nuit peignait pour ne pas hurler
Il en reste une encre noire perforant le papier
La mémoire et les tympans
La ligne de flottaison dépasse sa cote d’alerte
Les cales trop pleines aspirent à s’engloutir
L’immense cratère creusé par le naufrage
Confond les couleurs et les heures
Et le dernier fantôme se retourne dans son sommeil
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Avec ses volets gris souris et ses fers rouillés, la rue des Martyrs, c’est la via dolorosa de Paris.
On y trouve un peu de tout, des kamikazés ratés se recyclent en ouvrant des karaokés
Des karatekas s’entrainent dans la boutique abandonnée par le dernier débloqueur de mobiles.
Des Sri-Lankais nés entre Dambula et Kandy, nostalgiques des lampes à huile
Et des fleurs passées au cou des éléphants vendent des moulins à prières aux Népalais de plus en plus nombreux.
Il y a aussi des Péruviens qui se sont perdus entre Cuzco chicha ou Machu-Picchu quena
Des Jordaniens du Wadi Rum qui voulaient voir des tours Eiffel en vrai,
Des Rajputes de Vârânasî qui charrient des Boliviennes à chapeau d’hommes,
Des Mayas miraculés, un Karen marchand de…riz.
Un Canadien de Vancouver aux yeux bleu glacier est maqué avec une Mexicaine d’Oaxaca.
Un Javanais de la place Merdeka qui se balade avec un varan apprivoisé.
On vend des i phone à 30 euros, des tapis au même prix, garantis développement durable.
On était 4 autochtones à faire la belote mais Raymond n’a pas voulu finir l’année.
On a rangé les cartes, on se contentera de gratter des kenos à deux euros.
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La présente traversée est offerte par :
Elisa, Héliomel, 4z et Eclaircie
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C’est ici que s’ouvre le livre dans le livre
Depuis les rues enroulées dans leur écharpe
Les échelles grimpent jusqu’au ciel
Les toitures courbent leur dos d’ardoise
On se souvient de ces deux corps penchés
Au-dessus des tables grises
Quelques-uns égarés dans la spirale
Chantent encore la mémoire d’une sphère orange
Et l’on voit toujours ce grand bateau blanc
Accostant le rivage d’une île invisible
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Parfois la glace fond
Parfois on la couve
Comme un œuf
Avant de l’entendre se casser.
…Il y a un œil au plafond :
En été des mouches s’y collaient
Le ciel secouait son arrosoir
Au-dessus des plantations.
La fraîcheur d’une feuille de salade
Contre nos joues les rassure
On n’y mordra plus
Pour la pulpe qu’elles annoncent
Sous des rougeurs irrépressibles.
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Viens mon beau soleil noir
Que tu sois léger ou profond
Fais que l’eau de mes yeux
Se fige en cristal immobile
Toi mon vrai sommeil
Le gardien vigilant
De mes voyages insensés
Ouvre la fenêtre
Qu’il fasse chaud ou froid
On va partir tous les deux
On refera le monde
Jusqu’à l’aube entrouverte
Les façades émergent de la brume
S’interpellent se congratulent
S’interrogent de la fenêtre mauve encore fermée
-est-ce là le refuge de la lune fugueuse-
Elles rosissent d’émotion
Lorsque sur les trottoirs trottinent
Les réverbères et leurs allumeurs
S’en allant chercher l’ombre
Et quelque amadouvier pour partager leur flamme
Depuis le soupirail un œil pétillant
Lance des éclairs blonds
Confettis qui s’envolent pour maquiller le temps
Ont participé:
Eclaircie
Elisa
4Z
Heliomel
Chers amis,
Je ne sais pas vous, mais moi, toutes ces années, je ne sais plus où les mettre!
Elles s’entassent, s’empilent de la cave au grenier, je suis même obligé de les ranger par siècles.
Il y en a des fameuses, des glorieuses, d’autres qu’on préférerait oublier…
Ce qui ne m’empêche pas, Eclaircie, Elisa, Téquila, 4Z de vous souhaiter une bonne année, rangée ou désordonnée, l’essentiel étant qu’elle nous permette de poursuivre nos échanges que je ne saurais qualifier (loufoques, baroques ou autres, ne me faites pas dire ce que je n’ai même pensé)
J’associe aussi celles ou ceux qui nous font l’honneur de nous lire ou de déposer des textes, je ne les citerai pas tous, mais j’ai une pensée particulière pour Josy, Air-pur et Oulra, que les autres me pardonnent.
Je vous embrasse
Heliomel